Parmi les piliers de la pleine conscience qui sont, pour moi, un fil conducteur à suivre dans notre vie personnelle comme professionnelle, nous trouvons la patience. Je vous ai déjà parlé, dans de précédents articles, des autres piliers que sont le lâcher prise (le-developpement-de-son-lacher-prise), la confiance (ameliorer-sa-confiance-en-soi) et l’acceptation (lacceptation-au-travail-quesaco).
En effet, combien de situations vivons-nous au quotidien qui mettent à rude épreuve nos nerfs et notre tentation naturelle à la frustration ? Surtout au travail ? Si le corps réagit rapidement à ce sentiment d’inconfort par des tensions musculaires entre autres qui, parfois, subsistent longtemps avant que nous nous en rendions compte, notre esprit est lui aussi envahi de pensées qui nous font perdre notre calme. Les événements ne se produisent pas assez vite ou tels qu’on le souhaiterait, dans l’ordre que l’on a décidé. La méditation est un merveilleux moyen de faire le pas de côté salvateur pour retrouver sa sérénité et le comportement adapté à la situation. Le fait de se reconnecter à l’instant présent et au corps n’est pas meilleure réponse à cette impatience. Je vous renvoie à mon article sur mon-reflexe-meditation. Le body scan (scanner corporel), d’ailleurs, en est la forme la plus adaptée en ce qu’il nous permet de nous arrêter et d’observer corps et esprit en proie à l’excitation. Il consiste à passer en revue, par la respiration ample, chaque partie de son corps afin de lui insuffler de la détente. Vous trouverez à ce sujet une guidance de méditation sur ma chaîne Youtube Emotions et solutions : https://www.youtu.be/DLzSPUOYVlc.
Il y a une autre manière complémentaire de prendre de la distance par rapport à notre impatience : c’est de repérer l’émotion qui se cache derrière. Moi, qui suis une réelle impatiente et qui essaie de me soigner chaque jour pour ne pas me laisser envahir par les réactions désagréables qui accompagnent ce sentiment, j’ai remarqué que ce comportement est une façon habile de ne pas extérioriser une émotion bien plus forte, la colère. Quand les choses ne se font pas assez rapidement, et que l’on finit pas les exécuter soi-même, c’est souvent parce qu’on en veut à ceux à qui nous en avons fait la demande de ne pas les avoir réalisées dans des temps impartis. L’irritation est là. De même, si l’on est impatient face à une promotion que l’on considère mériter et qui ne vient pas, c’est aussi parce qu’on a une colère tapie en soi, nourrie par l’injustice qui pourrait être à l’origine de cet oubli de reconnaître notre travail.
La colère, comme toutes les émotions, apparaît pour notre seule protection et c’est une énergie qui gagne à sortir. Elle est utile au même titre que toutes les autres émotions aussi désagréables soient-elles. L’écouter évite de garder en soi un ressentiment qui s’ancrera en nous et ne fera que grandir. La colère qui se transforme en « pétage de plomb » est d’ailleurs une petite irritation qui n’est pas sortie au bon moment et qui a créé un volcan plein de lave en ébullition. Alors, l’enfouir sous l’impatience n’est pas une solution. C’est recouvrir le cratère en pensant que cela restera sous terre tranquillement et que cela passera avec le temps. Mais, irritations sur irritations ne font pas bon ménage et crée insatisfactions profondes en creusant le lit de sentiments mauvais.
Du point de vue cognitif, c’est un désastre également car les décisions que l’on peut prendre dans pareille situation ne sont jamais bonnes. Montaigne, que j’admire et qui est mon auteur préféré, disait « quand on me contrarie, on éveille mon attention, non pas ma colère ». Voilà le bon résumé du comportement à adopter : éveiller son attention ! C’est une bonne manière de s’extraire du sentiment dans lequel nous met l’impatience, l’agacement ou l’irritation, pour faire évoluer positivement la situation tant en notre faveur qu’en celle de notre entourage. C’est finalement de la maturité émotionnelle et une occasion de mieux se connaître. Il est alors essentiel de ne pas agir immédiatement mais de marquer un temps d’arrêt pour se rendre compte de ce qui monte en nous. Cela peut être très insidieux. Avec l’habitude, le repérage se fait plus vite et préventivement. Il sera alors possible de choisir d’agir ou non en ayant bien conscience que le recul pris aura réduit immanquablement la force du ressentiment. Dans les 2 cas, la décision sera réfléchie et posée. L’action sera mesurée et la colère n’aura plus l’éclat destructeur initial. La non-action ne sera pas une faiblesse mais le résultat d’une déconstruction de l’émotion jusqu’à la démanteler.
Nous avons tous la capacité de différencier objectivement les perceptions de la réalité et de ne pas nous laisser submerger par notre cerveau reptilien qui nous incite à réagir impulsivement. Montaigne a développé la notion d' »épochè » fort à propos ici. C’est l’idée de suspension de son jugement, aux antipodes de l’action effrénée sans raison. Patienter et laisser venir à soi ce qui n’aurait pas eu le temps de s’exprimer parce que l’émotion forte aurait balayé tout sur son passage et même renverser les choses de façon très fâcheuse (disputes, conflits, propos déplacés, sanctions, etc). Réaliser l’impermanence des émotions qui ne font que passer, comme les pensées qui en découlent.
Dans le monde professionnel, malheureusement, cette qualité n’est pas souvent reconnue comme essentielle pour manager une équipe. C’est bien regrettable si l’on juge les comportements caractériels de certains d’entre eux. Et je suis certaine que vous en avez des exemples en tête. Le propre du leadership est pourtant de savoir distinguer en soi ce qui apportera à la relation professionnelle créée et ce qui, à l’inverse, l’entachera, parfois profondément. A méditer !