S’aider de ses émotions pour communiquer au travail

Nous avons vu, dans un précédent article sur la-flexibilite-emotionnelle, qui abordait la peur, que se cache toujours un besoin derrière l’expression d’une émotion. L’incidence de cette causalité sur le mode de communication que l’on crée au travail est essentielle et permet de mieux comprendre les conséquences parfois délétères du rapport de force qui s’installe à notre insu.

Une meilleure communication au travail grâce à l'écoute de nos émotions
  • Derrière la tristesse, se cache un besoin de réconfort et de sécurité ;
  • Derrière la joie, nous trouvons le besoin de partage et d’échange ;
  • Derrière la colère, la recherche de justice et de respect est la plupart du temps présente ;
  • Derrière le dégoût, c’est l’estime de soi et une volonté de distance qui sont convoqués ;
  • Enfin, derrière la surprise, le besoin à satisfaire est celui de sérénité et de retour au calme

Le souci est que nous ne sommes pas toujours conscients de ce besoin inassouvi lorsqu’une émotion se manifeste. Le plus souvent, l’émotion éclate, elle nous submerge, et l’autre est éclaboussé de façon violente par nos réactions. Ce sont souvent 2 égos qui se confrontent et veulent avoir raison sans forcément écouter ce que l’autre veut nous dire. Chacun reste sur son interprétation et veut satisfaire son besoin en priorité. Naissent alors des incompréhensions et des malentendus alimentés par le refus d’entendre et la cacophonie des égos. La difficulté vient, pourtant, généralement, de façons différentes d’appréhender les choses et la situation concernée. Les objectifs peuvent être contradictoires ou les méthodes de travail aux antipodes. Dans tous les cas, cela mérite de se poser et de s’écouter.

Marshall Rosenberg, docteur en en psychologie, a développé la méthode OSBD qui est un langage de communication non violente (CNV) reposant sur l’empathie et la bienveillance. Elle incite à parler de soi et non sur l’autre, ⁠à se concentrer sur ce que l’on ressent et à l’exprimer objectivement.⁠ Il n’y a plus de confrontation ni de recherche de supériorité de l’un sur l’autre. Le besoin à satisfaire est au centre de la conversation mais en le transformant en moteur du dialogue et non en objet à imposer et à agiter devant son interlocuteur. La relation créée est bien en mode gagnant-gagnant.

Cette méthode OSBD repose sur 4 étapes à suivre scrupuleusement avant tout échange communication que l’on veut instaurer :⁠

O comme Observation objective des faits, sans jugement, dans l’intention de ne citer que des éléments facilement vérifiables ne pouvant créer de polémique :  » je t’avais demandé d’être à l’heure ce matin car nous avions réunion de présentation de notre dossier à 9h00″⁠. L’avantage est ici d’attirer l’attention de l’autre sans le bousculer et le mettre sur la défensive en formulant des reproches et des critiques hâtives.
S comme ses Sentiments à exprimer, en employant le « je »⁠, ce qui est primordial. Le but est de donner sa perception légitime des faits : « j’ai l’impression que tu ne te désintéresses de ce dossier et que tu ne t’investis pas depuis le début, ce qui me déçoit car je me sens seule et cela me stresse ». Mieux vaut exprimer sa déception ou son malaise plutôt que des sentiments de colère, ce qui ne serait pas constructif et risquerait d’inciter l’autre à l’agressivité
B comme exprimer son Besoin à satisfaire pour que la situation ne soit plus vécue comme négative et que la relation puisse repartir sur des bases solides de changement. Nous ne sommes pas encore au stade de la formulation de l’action⁠ souhaitée : « j’ai besoin de davantage d’implication de ta part pour me sentir épaulée et que l’on retrouve la coopération que nous avions avant ».
D comme Demande claire et précise à formuler, ce qui suppose, sans exiger, d’exprimer les actions concrètes à mener pour que la relation soit différente et reparte en mode gagnant-gagnant, avec le sentiment pour les 2 parties, que l’échange a été équitable dans une relation de confiance et d’adulte à adulte (notion chère à lanalyse-transactionnelle). ⁠L’adulte est celui qui se comporte de manière rationnelle en recherchant la meilleure décision, sans chercher à inférioriser l’autre dans une posture qui serait davantage celle du parent avec l’enfant.
« Donc je te demande de caler dans ton agenda un point chaque mardi à 10h avec moi de sorte que nous avancions sur ce dossier dans la semaine, et puissions, à nouveau, dans un mois, présenter ensemble, un support de qualité ».

Le respect de chacune de ces étapes est primordial pour garantir l’efficacité de la démarche. Le poids des mots employés est un de ses atouts afin de ne pas tomber dans une spirale émotionnelle néfaste à la relation. L’emploi du « je » est essentiel justement pour éviter de reporter son émotion sur l’autre ; il favorise l’observation, au contraire, des effets de celle-ci sur notre dialogue intérieur, avant d’exprimer quoique ce soit

L’ultime étape est évidemment l’écoute de ce que notre interlocuteur a à nous dire car la réussite de la méthode passe par la capacité à recevoir la réponse de l’autre et d’être attentif à ses réactions. Si elles sont difficiles à entendre, il y a lieu de rester dans l’assertivité et de continuer l’usage de la démarche jusqu’au bout pour trouver une issue favorable.

Dans notre exemple, le besoin en cause que nous cherchons à satisfaire est la sécurité professionnelle. En effet, le comportement de notre collègue nous met dans une fragilité et entache, selon nous, notre efficacité professionnelle par le fait que le travail attendu est un travail en binôme. Par conséquent, l’enjeu de l’échange avec le collègue est crucial. Il en va de la continuité de la relation professionnelle et de la capacité à rebondir pour être en mesure de rendre un dossier de qualité. On voit bien les conséquences néfastes qu’aurait pu causer une communication au travail en mode confrontation.

Il est intéressant de comprendre que cette méthode OSBD conforte l’affirmation de soi en n’obérant pas le besoin que chacun a à exprimer ce qu’il ressent. Il n’est pas question ici de se taire et de garder pour soi ce que l’on a sur le cœur. On a vu précédemment comment-ameliorer-sa-confiance-en-soi et comment la cultiver car elle n’est pas innée et évolue tout au long de notre vie. Cet exercice est une bonne occasion de la muscler. Avez-vous des illustrations en tête de situations au travail qui auraient pu mal tourner ou qui ont mal tourné du fait d’une communication (in)adaptée ? N’hésitez pas à me laisser vos commentaires ci-dessous.